Rudolf Karel (1880-1945)

Né le 9 Novembre 1880 à  Pilsen, il n’entre au conservatoire de Prague.qu’en 1901. C’est donc assez tardivement qu’il entame son  apprentissage musical ( notamment l’orgue avec Klicka.) A la fin de son cursus, il deviendra un des derniers élèves d’Anton Dvořák pour la composition et l’orchestration.

Quand la première guerre mondiale éclate, il a déjà composé  de nombreuses œuvres de musique de chambre, un opéra « Le cœur d’Ilse » op. 10 (1909),  une grande épopée symphonique, intitulée  » Idéale  » op. 11 (1909) et sa symphonie « Renaissance » op. 15;  il vient de terminer  sa symphonie pour violon et orchestre (op. 20). Il se trouve alors en Russie où il y passe l’été, quand il est suspecté d’être un espion autrichien,  et enfin arrêté. Finalement il  ne pourra rentrer  dans son pays qu’en 1923 ; Entre temps, la révolution d’octobre l’aura conduit de Omsk à Vladivostok et Irkoutsk ;  villes dans lesquelles il put exercer le métier de chef d’orchestre et de professeur. Une seule œuvre composée entre 1918 et 1920 intitulée « Démon » (op 23)  subsiste de cette période  Créée par la Philharmonie tchèque en 1921, elle obtiendra un vif  succès auprès du public.

De retour à Prague en 1923, Rudolf  Karel est  nommé professeur de composition au conservatoire.

Durant  la période de l’entre deux guerres, il compose  des cycles de mélodies et des cantates, un opéra  « La mort-marraine » op. 30 (1932) un  « Quatuor à cordes » op. 37 (1936) une nouvelle « Symphonie du Printemps » op. 38 (1938).

En 1938,  les accords de Munich, signent la mort de la Tchécoslovaquie  en tant qu’état indépendant,  offrant par la même occasion  l’autorisation tacite à  Hitler d’annexer la région des Sudètes. Une de ses conséquences sera de pousser 150 000 à 250 000 Tchèques à quitter cette région. On connait la suite. Quelques mois plus tard, Hitler envahit la Tchécoslovaquie. Antifasciste convaincu, Rudolf Karel qui approche alors de la soixantaine, se lance dans la résistance. Pour autant,  cela ne l’empêche pas de continuer à écrie notamment une « Ouverture révolutionnaire » op. 39 (1941).

Malheureusement,  en 1943, il est arrêté et emprisonné dans une prison de Prague dans le quartier de Pankrac.  Là encore , même incarcéré, alors que la Gestapo lui fait  subir régulièrement de pénibles interrogatoire,  il continue de composer. de la musique pour piano mais aussi son conte « Les trois cheveux d’or du grand-père omniscient ». Comment s’y prend-il ? Grâce à la complicité de gardiens  et de médecins de la prison il obtient en cachette  de simples feuilles de papier toilette sur lesquelles il dessine des portées de musique et écrit sa musique.  240 feuillets sortiront ainsi en cachette de la prison.  C’est de cette manière qu’il écrivit également son Nonette op 43 (pour flûte, hautbois, clarinette, basson, cor anglais, violon, alto, violoncelle et contrebasse,) entre le 16 janvier et le 5 février 1945. Envoyé ensuite à la petite forteresse de  Terezin,  la dysenterie l’emporte le 6 mars 1945 .

Terezin plage

Ce roman de Morten Brask  s’ouvre sur un rêve, celui qui berce un jeune médecin danois Daniel Faigel dans un train à destination de Terezin. Sur le sable de cette plage auquel il rêve, se sont gravés les meilleurs souvenirs de  son enfance. Rien ne pouvait le préparer à l’enfer auquel il va être confronté dans ce train, où la promiscuité, la puanteur, la peur et la faim fragilisent  les êtres qui y sont entassés,  au point que certains ne survivront pas à ce voyage de plusieurs jours.

Arrivé à Terezin, Daniel est immédiatement affecté à l’hôpital Hohen.Olben Il ne lui faudra pas longtemps pour saisir les privilèges que son poste va lui apporter. Mieux nourri, il sait qu’il pourra plus facilement résister aux conditions de vie du camp. Comment soigner dans de telles conditions des malades souffrant de dysenterie, de tuberculose ou simplement de multiples plaies quand tout manque : absence de nourriture digne de ce nom, absence d’hygiène et absence de médicaments. Il lui faudra bien souvent choisir parmi ses malades  entre ceux dont il estime qu’ils ont une chance de s’en sortir et ceux qui sont condamnés d’avance et qui seront sélectionnes pour le prochain convoi en partance pour une destination dont chacun devine l’issue.
Morten Brask ne dépeint pas seulement la vie des juifs à l’intérieur de la ville fortifiée de Terezin, il  intercale  une autre  narration, celle qui ramène Daniel Faigel au Danemark, pays de son enfance entre la figure austère d’un père, juge de son métier qui aurait souhaité que son fils embrasse la même carrière de juriste, et une mère dont on nous laisse présager que la fragilité  psychologique ait pu être à l’origine de sa vocation. La force d’un délire c’est qu’il entraine celui qui le vit sans que bien souvent l’entourage puisse le retenir.

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Extrait :

 » La maison est pleine de gens. Apparemment quelqu’un a organisé un petit concert, car à travers les fenêtres du premier étage, je vois le violoniste debout et un public assis autour de lui. Je reste là et j’écoute. D’autres personnes viennent me rejoindre pour écouter le violoniste. Quand il lève  son archet et que la dernière note s’évanouit le silence est total. Personne n’applaudit. Tout le monde attend un  ouveau morceau. Une femme d’une soixantaine d’années qui était assise derrière le violoniste, se met debout , se met debout à côté de lui. Le violoniste pose à nouveau son archet sur les cordes et entame un morceau son archet sur les cordes et entame un morceau lent et triste. La femme a une voix grave. Un homme à côté de moi se penche et me dit à l’oreille en désignant la femme d’un geste du menton :

– C’est la plus grande.Quand elle était jeune, elle chantait pour l’empereur .
-Qu’est-ce qu’elle interprète?

 Une pièce de Gustav Mahler. Kindertotenlieder, les chants sur la mort des enfants.

La voix grave de la cantatrice fait exploser la petite pièce, traverse murs et boiseries, envahit toute la maison, s’échappe dans Seestrasse et se répand dans le ghetto tout entier.

Oft denk’ ich sie sind nur ausgegangen !

Bald werden sie wieder nach Hause gelangen !

Der Tag ist shcön, o sei nicht bang !

Sie machen nur einen weitern Gang !

Souvent, je me dis qu’ils sont juste sortis!

 Qu’ils vont bientôt rentrer à la maison !

Il fait beau, Ne t’en fais pas !

Ils font juste un grand tour !

                                                   

Hommage à Gideon Klein

Photo The Gideon klein fondation

Il naît  le 6 décembre 1919 à Prevov,  en Moravie dans une  famille enracinée dans la tradition juive. Très tôt sa famille remarque ses aptitudes musicales. Il commence à étudier le piano  dès 6 ans. Devant ses aptitudes, à 11 ans  il se rendra  une fois par mois à Prague afin de prendre des cours avec l’épouse du célèbre pianiste Vilem Kurz . L’année suivante, il emménagera dans la capitale chez sa sœur Eliska Kleinova.

À l’automne 1938, il est admis dans la classe de Kurz au Conservatoire de Prague, (il obtiendra son diplôme l’année suivante.)  En même temps, il entreprend des études de philosophie et de musicologie à l’Université Charles.

Photo Terezin Music fondation

Les lois anti-juives que les allemands  font appliquer depuis  l’invasion  de la  Tchécoslovaquie le 15  mars 1939, lui interdiront de poursuivre son cursus universitaire. Quitter son pays devient la seule solution. Alors qu’il obtient une bourse pour étudier à la Royal Academy de Londres, son départ est annulé.

  Les lois anti-juives ne lui permettant plu de donner des concerts, il se produira durant quelques temps sous le nom de Karel Vranek., dans des  petits théâtres d’avant gardes ou de salons privés avec quelques  amis juifs.

Le 1er décembre 1941, avec des milliers d’autres Juifs de Prague, il est déporté à Terezin, rebaptisé par les allemands Théresienstadt. Là-bas, il côtoie d’autres  musiciens : le pianiste et chef d’orchestre Rafael Schächter, Karel Ancerl qui deviendra chef d’orchestre du philharmonique tchèque ainsi que d’autres compositeurs Hans Krasa  (connu entre autre  pour son opéra Brundibar ), Victor Ulman et Pavel Haas.

Malgré les difficultés de l’emprisonnement et le manque de matériels à leur disposition (partitions et instruments) Gideon Klein comprend qu’avec le potentiel  d’artistes présents à Terezin, qu’il y a une possibilité de poursuivre des activités culturelles à l’intérieur du camp.  En 1942,il est même nommé à la tête du département Musique instrumentale dans la direction des activités de temps libre (Freizeitgestaltung)

Photo The Gideon Klein fondation

Il fait  de la musique de chambre avec ses collègues de Prague,participant à  des spectacles comme  La Fiancée vendue de Smetana, ou encore le Requiem de Verdi  et interprète le répertoire qui la fait connaître en tant que soliste  à Prague (sur une vieux piano ) :  la Sonate Op.110 de Beethoven , la  Fantaisie op.17 de Schumann  des pièces de Mozart ou de Brahms , Janacek Schoenberg, Scriabin, ainsi que la toccata et fugue en ré min  de Bach ( transcrit par Busoni) Par ailleurs il poursuit son travail de compositeur. Avant sa déportation il avait suivi des cours avec le compositeur  Aloïs Haba, (1893-1973, qui travaille avec les quarts de ton).  Gideon Klein est avant tout  un autodidacte. Les œuvres qu’il a écrites à Terezin sont des pièces de musique de chambre pour cordes, des  œuvres chorales, des madrigaux sur  des poèmes de Hölderlin et Villon, une sonate pour piano, musique de scène pour le théâtre, et un cycle de chansons pour alto et piano etc. En tout il laisse plus d’ne quinzaine de pièces influencées par le folklore morave, des mélodies traditionnelles hébraïque et le travail des compositeurs Leos Janacek, Vitezslav Novak et Arnold Schoenberg

La musique qu’il a écrite à Terezin, nous est parvenue par une de ses dernières amies  dans le ghetto,  Irma Semtzka à laquelle il avait confié ses compositions dans l’espoir  qu’elle les  remette à sa sœur ainée  Eliska Kleinova (déportée à Auschwitz). Mais en juin 1990, des amis de la famille Klein a retrouvé une valise oubliée depuis plus 40 ans. Elle contenait des pièces écrites avant sa déportation

Le 1er Octobre 1944 , neuf jours après avoir écrit les dernières notes de  son trio à cordes,  Gideon Klein est envoyé à Auschwitz, puis à Fürstengrube, un camp de travail dépendant d’Auschwitz, qui exploite des mines de charbon. Le 27 janvier 1945, il meurt  dans des circonstances incertaines.

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Après la guerre Irma Semtzka a  retrouvé à Prague Eliska et lui  a donné les manuscrits  de son frère. Alors qu’elle souffrait de manque d’argent, cette dernière a réussi à organiser un concert le 6 Juin 1946 dans la petite salle du Rudolfinium consacré  aux œuvres de Gideon  Klein.

Source  : http://holocaustmusic.ort.org/

I remember Gideon Klein

Sylvie Bodorova

Rares sont les  femmes compositeurs dont l’œuvre est jouée dans le monde entier. Sylvie Bodorová est l’une d’ entre elles.

Après avoir étudié la composition à l’Académie de musique de Janacek à Brno et à l’Académie de musique de Prague, elle poursuit  ses études avec le professeur Franco Donatoni à l’Academia Chigiana. Elle assiste à partir de 1987 aux cours de composition Professeur Ton de Leuw à Amsterdam.

Professeur à l’Académie Janacek de Brno, de 1994 à 1996,  elle est invitée comme  compositeur en résidence à la CCM de Cincinnati.

Sa  première pièce (pour piano) elle l’a écrite  alors qu’elle n’avait  que sept ans.

Elle est lauréate de plusieurs concours et bénéficiaires de nombreuses commissions, dont la dernière au Festival de Warwick pour son Requiem du ghetto de Terezin.

Dans une interview à radio Prague elle a déclaré au sujet de son Requiem. « :Le message est très clair. La pièce est inspirée par la performance d’un requiem de Verdi dans le camp de concentration de la Seconde Guerre mondiale] que fut ce lui de  Terezín. Et je me suis rendu à Terezín et j’ai vu toutes les circonstances, c’était si puissant que j’ai décidé d’écrire une pièce inspirée par cet événement. Le message est très clair: nous devons nous rappeler ce qui s’est passé et nous devons tout faire pour que cela ne se produise plus à l’avenir. Et je suis très heureux que ce morceau soit joué partout dans le monde, non seulement parce que c’est ma musique, mais parce que ce message est clair et beaucoup de gens comprennent ce que je voulais dire par elle. »

Lacrymosa du requiem du ghetto de Terezin