Ce roman est un véritable chef d’oeuvre. Je vous en livre ici un extrait. Il s’agit d’une lettre, qu’une mère écrit à son fils Vitia.
« Mais je voudrais te parler aussi d’autre chose. Je ne me suis jamais sentie juive depuis l’enfance je vivais parmi des amies russes, mes poètes préférés étaient Pouchkine et Nébrassov et la pièce où j’ai pleuré avec toute la salle au congrès des médecins de campagne est Oncle Vania avec Stanislawski dans le rôle principal. Et il y a bien longtemps, j’avais quatorze ans, ma famille avait décidé de partir pour l’Amérique du Sud. Et j’ai dit à papa: « Et pourtant Je ne quitterai jamais la Russie, je me pendrai plutôt. » Et je ne suis pas partie. en ces jours terribles mon cœur s’est empli d’une tendresse maternelle pour le peuple juif . Je ne me connaissais pas cet amour auparavant. Il me rappelle l’amour que j’ai pour toi, mon fils bien aimé. »
BIOGRAPHIE : Né le 12 décembre 1905, en Ukraine, à Berditcherv, (ville célèbre, grâce au rabbin Levi Yitzhok de Berditchev, un des plus populaires de l’histoire du ‘Hassidisme, décédé un siècle plus tôt, lui même disciple de Dov Baer de Mezeritch ), Vassili Grossman étudie à Kiev puis Moscou et devient ingénieur chimiste en 1929. Après son divorce en 1932, il se consacre à l’écriture et abandonne son métier. Sa première nouvelle publiée en 1934 « Dans la ville de Berditchev », reçoit les encouragements de Maxime Gorki.
Alors que les purges soviétiques battent leur plein, Porte-parole du régime soviétique (qui le nomme en 1937 membre de l’Union des Écrivains Soviétiques) il se porte volontaire pour devenir correspondant de guerre dans les rangs de l’Armée rouge de 1941 à 1945, après avoir été réformé pour le service militaire.A la fin de la guerre pourtant, sa conscience politique évolue en profondeur. Son entrée à Tréblinka en juillet 1944 et la nouvelle de la mort de sa mère ont sans doute été le déclencheur ou alors un puissant accélérateur de ces nouvelles prises de position. Il mettra sa plume au service de la vérité d’abord avec » L’enfer de Tréblinka « .
« Même quand elle est terrible, l’écrivain doit écrire la vérité et le lecteur la connaître. »
Ce roman biographique retrace l’histoire de deux fillettes ukrainiennes, Janna et Frina Archanskaïa. Alors que toute leur famille a été sauvagement exécutée par les Einsattsgruppen, elles ont réussi à s’échapper et à survivre grâce à leur courage, leur sang froid mais aussi leur talent musical.
Si Greg Dawson s’est tant intéressé à leur destin au point de vouloir s’en faire le porte parole, c’est qu’elle le touche au premier plan. Janna qui n’est autre que sa propre mère, lui a longtemps caché la vérité.
Sur ces années sombres, les deux sœurs ont préféré gardé le silence. Silence en opposition à la musique qu’elles ont porté comme un force et un baume sur leurs plaies.
Au delà de ses maladresses littéraires, Greg Dawson leur rend un touchant témoignage en même temps qu’il nous offre une magnifique leçon de vie.
« Dimitri n’avait jamais entendu une traître note de Paganini- un phonographe était chose rare dans les foyers ukrainiens – et jamais il n’aurait osé s’attaquer à l’une de ses œuvres. Il aurait considéré sacrilège d’abimer la musique de son dieu. Mais s’il n’avait pas le talent de Paganini, Dimitri était suffisamment doué pour jouer lors des mariages et faisait partie d’un petit ensemble qui accompagnait les films muets américains projetés au théâtre en plein air de Berdiansk – sans parler du récital quasi quotidien que son ami Nicoli et lui donnaient au salon, pour le régal de leur unique auditrice , partagée entre l’extase et le sommeil. » page 30
« D’instinct Jana avait deviné la mort des siens à Drobitski Yar. Mais elle n’en parlait pas et s’interdisait même de l’imaginer. Cette certitude inexprimable demeurait enfermée dans un noir recoin de son âme, à la fois profane et sacrée- taboue. Se cacher l’horreur: seul moyen qu’elle eût de se prétendre Anna Morozova et d’obéir à l’ultime recommandation de son père : Vis ! »
Ce roman de Morten Brask s’ouvre sur un rêve, celui qui berce un jeune médecin danois Daniel Faigel dans un train à destination de Terezin. Sur le sable de cette plage auquel il rêve, se sont gravés les meilleurs souvenirs de son enfance. Rien ne pouvait le préparer à l’enfer auquel il va être confronté dans ce train, où la promiscuité, la puanteur, la peur et la faim fragilisent les êtres qui y sont entassés, au point que certains ne survivront pas à ce voyage de plusieurs jours.
Arrivé à Terezin, Daniel est immédiatement affecté à l’hôpital Hohen.Olben Il ne lui faudra pas longtemps pour saisir les privilèges que son poste va lui apporter. Mieux nourri, il sait qu’il pourra plus facilement résister aux conditions de vie du camp. Comment soigner dans de telles conditions des malades souffrant de dysenterie, de tuberculose ou simplement de multiples plaies quand tout manque : absence de nourriture digne de ce nom, absence d’hygiène et absence de médicaments. Il lui faudra bien souvent choisir parmi ses malades entre ceux dont il estime qu’ils ont une chance de s’en sortir et ceux qui sont condamnés d’avance et qui seront sélectionnes pour le prochain convoi en partance pour une destination dont chacun devine l’issue. Morten Brask ne dépeint pas seulement la vie des juifs à l’intérieur de la ville fortifiée de Terezin, ilintercale une autre narration, celle qui ramène Daniel Faigel au Danemark, pays de son enfance entre la figure austère d’un père, juge de son métier qui aurait souhaité que son fils embrasse la même carrière de juriste, et une mère dont on nous laisse présager que la fragilité psychologique ait pu être à l’origine de sa vocation. La force d’un délire c’est qu’il entraine celui qui le vit sans que bien souvent l’entourage puisse le retenir.
» La maison est pleine de gens. Apparemment quelqu’un a organisé un petit concert, car à travers les fenêtres du premier étage, je vois le violoniste debout et un public assis autour de lui. Je reste là et j’écoute. D’autres personnes viennent me rejoindre pour écouter le violoniste. Quand il lève son archet et que la dernière note s’évanouit le silence est total. Personne n’applaudit. Tout le monde attend un ouveau morceau. Une femme d’une soixantaine d’années qui était assise derrière le violoniste, se met debout , se met debout à côté de lui. Le violoniste pose à nouveau son archet sur les cordes et entame un morceau son archet sur les cordes et entame un morceau lent et triste. La femme a une voix grave. Un homme à côté de moi se penche et me dit à l’oreille en désignant la femme d’un geste du menton :
– C’est la plus grande.Quand elle était jeune, elle chantait pour l’empereur .
-Qu’est-ce qu’elle interprète?
Une pièce de Gustav Mahler. Kindertotenlieder, les chants sur la mort des enfants.
La voix grave de la cantatrice fait exploser la petite pièce, traverse murs et boiseries, envahit toute la maison, s’échappe dans Seestrasse et se répand dans le ghetto tout entier.
Pour connaitre quel destin fut celui du dernier Rabbi de Loubavitch: Ménahem Schnerson,combler certaines lacunes et mieux saisir sa pensée, ou encore dépasser simplement quelques préjugés : une biographie : celle de Schlomoh Brodowitcz.
A mettre entre toutes les mains, ce livre se lit comme un roman.